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Se défaire de l'emprise...

Article de juin 2018 paru dans sciences humaines.com

 

Nous sommes tous plus ou moins sous emprise. Sous l’emprise des écrans, qui ont envahi nos vies quotidiennes (7 heures par jour en moyenne !) et nous tiennent captifs bien au-delà de ce qui serait utile pour travailler, s’informer ou se distraire. Sous l’emprise d’une consommation débridée, qui va bien au-delà des besoins élémentaires et de confort que réclame une vie. Un coup d’œil vers nos poubelles débordantes suffit à nous donner la preuve de notre voracité.

Sous l’emprise d’un travail toujours plus envahissant et exigeant qui finit par nous épuiser.

Ces formes d’emprise ne sont pas celles d’un pouvoir totalitaire et occulte qui nous manipulerait à notre insu. Nous en sommes plutôt des victimes consentantes, bien qu’affolées. La prise de conscience progresse, et avec elle la volonté de contrôler sa consommation, sa dépendance aux écrans. D’où cette question qui taraude de plus en plus la plupart d’entre nous : comment décrocher ?

 

Qu’est-ce que l’emprise ?

 « L’emprise psychologique » évoque le manipulateur pervers : un personnage malfaisant qui utilise son pouvoir de séduction pour envoûter quelqu’un, le dépouiller ou l’abuser. Mais l’amour en général n’est-il pas une forme d’emprise ? Et le pouvoir ? Qu’il soit aimé ou non, le chef d’entreprise exerce une emprise sur ses salariés du fait qu’il possède une ressource (l’emploi) qu’il échange contre un salaire. En réalité, il n’existe pas de définition canonique de la notion d’emprise, car différents types de liens se cachent derrière : l’enfermement, le contrôle, la surveillance, le conditionnement, l’endoctrinement, l’aliénation, la séduction, etc.

 

Une relation à deux...

 Dans tous les cas, l’emprise est une relation à deux. L’analyse change de focale selon que l’on met l’accent sur le pôle dominant (celui qui exerce d’emprise) ou le dominé (celui qui la subit).

En matière d’addiction (drogue de toute sorte), on peut se focaliser sur le rôle des narcotrafiquants et les relais (les dealers), l’industrie du tabac et ses vendeurs (débits de tabac), l’industrie pharmaceutique (les pharmaciens et les médecins), les vignerons et leurs réseaux de diffusion (du supermarché au beau-frère, on remet ça ?).

Mais on comprend qu’en matière de drogue en tout genre, l’addiction comporte des mécanismes psychobiologiques : les circuits de dopamine, les centres du plaisir qui sont impliqués et créent des dépendances psychiques et physiques.

 

... ou à trois ?

Entre les deux pôles, le dominé et le dominant, on comprend qu’il faut élargir les mécanismes d’influence à un troisième terme : les cercles d’appartenance. C’est aussi au sein de groupes plus ou moins restreints que circulent les agents d’influences que sont l’alcool, le tabac, les drogues, les médicaments, les jeux vidéo, les séries télé, les smartphones et a priori les réseaux sociaux qui se diffusent de haut en bas.